Expatriation et IFI : comment sont taxés les biens immobiliers en France ?

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F. Germain AMOUZOUVI-DOVO
Juriste fiscaliste chez LexaNova
📅 08/07/2025 ⏱️ 10 min de lecture 🌍 Fiscalite Internationale
Expatriation et IFI : comment sont taxés les biens immobiliers en France ?

📋 Résumé de l'article

Découvrez comment l’IFI s’applique aux expatriés non-résidents possédant des biens immobiliers en France : seuils, calcul, obligations déclaratives, cas pratique et conseils pour 2025.

Expatriation et IFI : comment sont taxés les biens immobiliers en France ?

Introduction : Expatrié, êtes-vous toujours redevable de l’IFI en 2025 ?

En 2025, près de 20 000 foyers non-résidents sont redevables de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI), alors même qu’ils résident désormais hors de France. Quelle fiscalité s’applique à vos biens immobiliers après une expatriation ? Un départ à l’étranger suffit-il à effacer toute imposition sur votre patrimoine français ? La réponse réserve bien des surprises : l’IFI conserve un impact fort sur le patrimoine détenu en France par les expatriés. Comment déterminer les actifs imposables, éviter le risque de double imposition et optimiser sa déclaration ? Ces questions sont essentielles pour anticiper vos engagements fiscaux, sécuriser vos actifs et éviter toute mauvaise surprise lors d’un contrôle.

Ce guide complet, illustré d’un cas pratique, vous éclaire sur les règles d’imposition de l’IFI pour les non-résidents, les modalités de calcul, les obligations déclaratives et les principaux points de vigilance pour 2025.

La notion de résidence fiscale et ses implications

En matière d’IFI, la distinction entre résident fiscal français et non-résident est fondamentale. Selon l’article 4B du Code général des impôts (CGI), un résident fiscal vit en France, y a le centre de ses intérêts économiques ou y séjourne plus de 183 jours par an. Un expatrié n’est donc imposé à l’IFI en France que pour les biens (ou droits réels immobiliers) situés sur le territoire français (BOFiP-PAT-IFI-10-20-10). Cette restriction du champ d’imposition est confirmée à l’article 964 du CGI : seuls les biens situés en France au 1er janvier de l’année d’imposition sont à déclarer.

Les biens soumis à l’IFI pour un non-résident

L’assiette de l’IFI inclut tous les actifs immobiliers français détenus directement (maisons, appartements, terrains), ainsi que les parts ou actions de sociétés immobilières (SCI, SARL de famille, SA). Lorsque ces sociétés possèdent directement ou indirectement plus de 50 % de leur actif sous forme d’immeubles situés en France, la fraction correspondante entre dans l’assiette de l’IFI (CGI, art. 965).

La situation est plus restrictive pour les expatriés : seuls leurs actifs localisés en France sont concernés (biens à l’étranger exclus). Les dettes contractées pour l’acquisition, les travaux ou l’entretien de ces biens sont déductibles du patrimoine taxable (CGI, art. 974), dans la limite de leurs liens directs avec les biens français.

Seuil, calcul et barème de l’IFI 2025

L’IFI concerne l’ensemble du patrimoine immobilier français net excédant 1 300 000 € au 1er janvier de l’année (BOFiP-PAT-IFI-20). Plusieurs abattements peuvent s’appliquer : un abattement de 30 % sur la résidence principale… mais uniquement pour les résidents en France (CGI, art. 973 ; BOFiP-PAT-IFI-20-20-20-20 n°20).

Le barème progressif 2025 s’applique ainsi :

  • 0 % jusqu’à 800 000 €
  • 0,5 % de 800 001 à 1 300 000 €
  • 0,7 % de 1 300 001 à 2 570 000 €
  • 1 % de 2 570 001 à 5 000 000 €
  • 1,25 % de 5 000 001 à 10 000 000 €
  • 1,5 % au-delà

La valeur nette s’obtient par déduction des dettes admissibles. Les revenus générés par ces biens restent soumis à l’impôt sur le revenu (CGI, art. 164 B), avec possibilité d’opter entre le régime micro-foncier (abattement forfaitaire de 30 % pour des revenus inférieurs à 15 000 €) ou le régime réel (déduction effective des charges).

Plus-values, conventions fiscales et obligations déclaratives

Toute cession d’un bien immobilier français par un non-résident génère une plus-value imposable en France : 19 % d’impôt et 17,2 % de prélèvements sociaux (soit un taux combiné de 36,2 %), avec abattements progressifs selon la durée de détention jusqu’à exonération totale après 22 ans (CGI, art. 150U ; BOFiP-IR-IMM-20-20-20-10-20180322).

La double imposition est évitée dans la mesure où la plupart des conventions fiscales attribuent à la France le droit d’imposer les biens immobiliers situés sur son sol (article 6 des conventions OCDE). Toutefois, la convention fiscale signée avec le pays de résidence du contribuable peut aménager cette double imposition ; elle n’influe pas sur l’IFI, qui relève exclusivement de la France pour des actifs français.

Côté obligations déclaratives : l’IFI se déclare avec la déclaration d’impôt sur le revenu, via le formulaire 2042-IFI (ou 2725 pour quelques cas particuliers), à adresser au Service des Impôts des Particuliers Non-Résidents (SIPNR). Les revenus fonciers doivent figurer dans le formulaire 2042-NR et l’annexe 2044, et les plus-values dans le formulaire 2048-IMM.

Exemple concret : Jean-Luc, expatrié suisse, face à l’IFI

Mise en situation

Jean-Luc Morel, 50 ans, réside en Suisse depuis trois ans où il occupe un poste de cadre supérieur. Il conserve en France :

  • Une maison louée à Versailles (valeur : 750 000 € avec un emprunt de 200 000 € restant dû)
  • Un appartement vacant à Lyon (valeur : 400 000 € avec 50 000 € de dettes)
  • 30 % des parts d’une SCI détenant deux appartements à Marseille, ce qui représente une valeur nette de 900 000 € pour lui

Son patrimoine immobilier brut atteint 2 350 000 €, valeur nette après déduction des dettes : 1 800 000 €.

Analyse fiscale de la situation

Jean-Luc étant désormais non-résident (résident fiscal suisse), il est assujetti à l’IFI uniquement pour ses biens français : maisons, appartements, parts de SCI dont l’actif est constitué de biens situés en France (CGI, art. 964 et 965). Les emprunts et dettes afférents à ces biens sont déductibles du patrimoine servant de base de calcul.

Sa résidence principale étant en Suisse, il ne peut pas bénéficier de l’abattement de 30 % réservé à la résidence principale située en France (CGI, art. 973 ; BOFiP-PAT-IFI-20-20-20-20 n°20).

Simulation de calcul IFI 2025

  • Maison Versailles : 750 000 € – 200 000 € = 550 000 €
  • Appartement Lyon : 400 000 € – 50 000 € = 350 000 €
  • Parts SCI Marseille : 900 000 € (déjà nettes)
  • Total net taxable : 1 800 000 €

Application du barème :

  • 0 % jusqu’à 800 000 € → 0 €
  • 0,5 % de 800 001 à 1 300 000 € = 500 000 x 0,5 % = 2 500 €
  • 0,7 % de 1 300 001 à 1 800 000 € = 500 000 x 0,7 % = 3 500 €

Total IFI dû en 2025 : 6 000 €

Jean-Luc doit effectuer sa déclaration IFI via le formulaire 2042-IFI à adresser au Service des Impôts des Particuliers Non-Résidents (SIPNR) à Noisy-le-Grand. La convention fiscale franco-suisse n’exonère pas de l’IFI en France : la taxation reste de droit pour ses biens immobiliers français.

Points de vigilance et risques de redressement fiscal

Pour les expatriés, plusieurs erreurs récurrentes peuvent entraîner un redressement :

  • Omission de déclaration des actifs indirects : Les parts de sociétés (SCI, SCPI, OPCI, etc.) sont imposables si l’actif est majoritairement composé de biens immobiliers français (CGI, art. 965), même en cas de détention « minoritaire ».
  • Erreur dans la valorisation des biens : La valeur vénale au 1er janvier doit être justifiée. Une sous-évaluation expose à un rehaussement, la jurisprudence et le BOFiP imposant de solides éléments probants.
  • Déduction de dettes injustifiées : Seules les dettes en lien direct avec l’actif immobilier français sont admises (emprunts, travaux, certains frais d’acquisition non encore remboursés), conformément au CGI article 974.
  • Confusion domicile/résidence principale : L’abattement de 30 % sur la résidence principale ne s’applique pas pour les biens situés en France si le contribuable réside à l’étranger (BOFiP-PAT-IFI-20-20-20-20 n°20).
  • Risque lié à la non-déclaration : Tout défaut ou retard de déclaration expose à des pénalités pour déclaration tardive (10 %) majorées d’intérêts de retard (0,20 % par mois).

Des points particuliers doivent être surveillés, comme la situation des biens détenus par démembrement ou via une société étrangère, ou la co-titularité avec des tiers (indivision, usufruit, etc.). Enfin, des vérifications doivent porter sur les conventions fiscales, même si, en pratique, la plupart laissent à la France le soin d’imposer les biens français au titre de l’IFI.

Stratégies d’optimisation et opportunités

Poursuivre une expatriation ne met pas fin aux possibilités d’optimiser sa fiscalité en France. Quelques leviers à envisager :

  • Rigueur dans la valorisation et la justification des dettes : Seule une traçabilité parfaite permet la déduction des dettes liées (emprunt, travaux, frais de notaire). Envisagez de regrouper les justificatifs avant toute déclaration pour simplifier un éventuel contrôle.
  • Structuration via des sociétés : Certains montages (SCI à l’IS, holdings) permettent parfois d’optimiser la fiscalité globale, sous réserve d’une analyse préalable approfondie.
  • Anticipation des donations et successions : La structuration du patrimoine (démembrement, donations avec réserve d’usufruit) peut réduire l’assiette taxable à l’IFI.
  • Optimisation de la gestion locative : Mettre en location certains biens auparavant vacants peut orienter vers une autre fiscalité des revenus ou mener à un abattement micro-foncier non négligeable pour les revenus inférieurs à 15 000 €.
  • Domiciliation fiscale : Envisager le retour temporaire ou le déplacement du centre des intérêts économiques en France dans certaines situations de mutation internationale.
  • Vérification régulière des conventions fiscales : Pour exclure tout risque de double imposition involontaire, faites le point annuellement sur la situation légale entre la France et votre pays de résidence.

En toute situation, la sécurité impose de s’assurer de la conformité de ses déclarations, sous peine de sanctions significatives. Les règles évoluent : surveillez la doctrine BOFiP et le CGI, et sollicitez l’accompagnement d’un fiscaliste (franco-français ou international) en cas de difficulté ou d’opération patrimoniale complexe.

Conclusion et recommandations

L’IFI demeure une réalité incontournable pour tout expatrié possédant plus de 1,3 million d’euros en biens immobiliers situés en France. Même après un départ à l’étranger, il est crucial d’identifier précisément ses actifs imposables, d’estimer rigoureusement leur valeur et de déduire uniquement les dettes admises. La gestion de l’IFI impose rigueur et anticipation : en maîtrisant vos obligations et en documentant vos arbitrages, vous sécurisez votre patrimoine et évitez les déconvenues fiscales.

Pour toute situation particulière, ou une optimisation patrimoniale transfrontalière, la mise en relation avec un avocat fiscaliste via Lexanova permettra d’obtenir un éclairage adapté à votre situation, de vérifier la conformité de vos démarches et la bonne application des conventions internationales.

FAQ – Réponses aux questions fréquentes sur l’IFI et l’expatriation

  • Un non-résident est-il redevable de l’IFI ?
    Oui, si ses biens immobiliers situés en France dépassent 1 300 000 € nets au 1er janvier.
  • Quels biens sont pris en compte dans le calcul de l’IFI pour un expatrié ?
    Tous les biens immobiliers en France, détenus directement ou via des sociétés (SCI, SCPI, OPCI).
  • Quel est le seuil d’imposition à l’IFI pour un non-résident en 2025 ?
    Le seuil est de 1 300 000 € de patrimoine net immobilier situé en France.
  • Comment déclarer son IFI quand on n’habite plus en France ?
    Via le formulaire 2042-IFI à transmettre au Service des impôts des particuliers non-résidents (SIPNR).
  • L’exonération « résidence principale » IFI s’applique-t-elle aux non-résidents ?
    Non, elle est réservée aux résidents fiscaux français avec leur résidence principale en France.

L’essentiel à retenir sur l’IFI et l’expatriation

Pour les expatriés, l’IFI reste exigible sur tous les biens immobiliers détenus en France dépassant 1,3 million d’euros : cela inclut maisons, appartements, parts de société et autres droits immobiliers, dès lors qu’ils sont localisés sur le territoire. La valorisation des biens, la correcte prise en compte des dettes et la distinction stricte entre résidence fiscale et résidence principale sont les fondements d’une déclaration réussie.

Ne pas sous-estimer le risque de redressement lié à une omission, une sous-évaluation ou une mauvaise déclaration. Les conventions fiscales internationales n’éteignent pas l’obligation IFI : la France demeure compétente pour les biens situés sur son territoire. En tout état de cause, une veille légale et adaptative s’impose chaque année, notamment en cas d’évolution patrimoniale ou de changement de résidence fiscale.

Pour sécuriser vos démarches et bénéficier d’une analyse à jour, sollicitez l'intervention d’un professionnel qualifié via Lexanova qui saura, le cas échéant, adapter les solutions à votre situation complexe de contribuable international.

⚠️ Important

Cet article est fourni à des fins d'information uniquement. Pour des conseils fiscaux personnalisés adaptés à votre situation, consultez un avocat fiscaliste.

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