Le Conseil d'État, dans une décision du 8 octobre 2025, vient de préciser les modalités d'appréciation du caractère de société à prépondérance immobilière (SPI) pour l'application du régime fiscal des provisions pour dépréciation de titres.

Cette décision (N° 493896) confirme l'importance de la valeur réelle des actifs et censure l'administration fiscale lorsque celle-ci se fonde exclusivement sur la valeur comptable en présence d'une argumentation contraire du contribuable.

Contexte de l'affaire et régime applicable

L'affaire concernait une société, membre d'un groupe fiscalement intégré, qui avait constitué une provision pour dépréciation des titres d'une autre société, GDI. L'administration fiscale avait remis en cause la déductibilité de cette provision du résultat imposable au taux de droit commun, arguant que la société GDI n'était pas une société à prépondérance immobilière.

Il convient de rappeler le régime fiscal applicable. En principe, les provisions pour dépréciation de titres de participation relèvent du régime des moins-values à long terme, en application du 5° du 1 de l'article 39 du Code général des impôts (CGI).

Toutefois, l'article 219, a sexies-0 bis du CGI prévoit une exception notable pour les titres de sociétés à prépondérance immobilière (SPI) non cotées.

Pour ces titres, le régime des plus et moins-values à long terme ne s'applique pas. En conséquence, les provisions pour dépréciation afférentes à ces titres sont déductibles du résultat imposable au taux de droit commun, ce qui constitue un avantage financier immédiat pour l'entreprise.

Une société est qualifiée de SPI si son actif est constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou des titres d'autres SPI.

La question de la méthode d'évaluation de l'actif

Le point central du litige portait sur la méthode à retenir pour évaluer l'actif de la société GDI et déterminer si elle atteignait le seuil de 50 %.

L'actif de GDI comprenait notamment des titres d'une autre société, "Les Hérissons", que le contribuable considérait également comme une SPI.

L'administration fiscale, pour refuser la qualification de SPI à la société GDI, s'était fondée sur la valeur comptable des titres de la société "Les Hérissons" inscrits à son bilan.

Or, la société holding (LG Services) soutenait que la valeur réelle de ces titres était significativement supérieure à leur valeur comptable, ce qui aurait permis de qualifier GDI de SPI.

La décision du Conseil d'État

La cour administrative d'appel avait suivi le raisonnement de l'administration, jugeant qu'il convenait de retenir la valeur comptable des titres. Le Conseil d'État censure cette analyse et annule l'arrêt d'appel.

La Haute Juridiction administrative énonce un principe clair : si les dispositions légales prévoient que le caractère de SPI s'apprécie au regard de la valeur réelle des éléments d'actif, l'administration est fondée à retenir la valeur comptable uniquement en l'absence de toute argumentation du contribuable tendant à démontrer un écart avec la valeur réelle.

Dans le cas présent, le contribuable avait fourni une argumentation visant à établir que la valeur réelle des titres de la société "Les Hérissons" était supérieure à leur valeur comptable. En ignorant cette argumentation et en se limitant à la valeur comptable, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

Cette décision réaffirme la primauté de la valeur réelle pour qualifier une SPI et protège le droit du contribuable de contester l'évaluation de l'administration en apportant des éléments probants.

Conclusion et portée de la décision

La décision du 8 octobre 2025 clarifie la charge de la preuve en matière d'évaluation des actifs pour la qualification de SPI.
L'administration ne peut se contenter de retenir la valeur comptable lorsque le contribuable présente des arguments justifiant une valeur réelle différente.

L'affaire est donc renvoyée devant la cour administrative d'appel pour être jugée à nouveau sur ce point.

Pour les entreprises détenant des participations dans des sociétés immobilières, cette décision souligne l'importance de documenter précisément la valeur réelle des actifs sous-jacents afin de sécuriser le régime fiscal applicable à leurs provisions pour dépréciation.

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