Retard de paiement : la force majeure est-elle recevable ?
Analyse de la décision du Conseil d'État (N° 495329) sur la majoration pour retard de paiement et la notion de force majeure en matière fiscale.
Analyse de la décision du Conseil d'État (N° 495329) sur la majoration pour retard de paiement et la notion de force majeure en matière fiscale.
Dans une décision du 7 mai 2025 (N° 495329), le Conseil d'État a apporté des éclaircissements sur la possibilité pour un contribuable d'invoquer un cas de force majeure afin d'obtenir la décharge de la majoration de 10 % pour retard de paiement, prévue à l'article 1730 du Code général des impôts (CGI).
Si la haute juridiction administrative confirme l'existence de cette faculté, elle en donne une illustration restrictive, jugeant que la saisie d'avoirs financiers par l'autorité judiciaire ne suffit pas, en soi, à caractériser un tel cas.
Cet arrêt précise les contours d'une notion dont l'application en droit fiscal demeure exceptionnelle et souligne la rigueur de l'appréciation portée par le juge de l'impôt.
L'affaire concernait une contribuable qui s'était acquittée tardivement de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales. En conséquence, l'administration fiscale lui avait appliqué la majoration de 10 % prévue par l'article 1730 du CGI.
Pour contester cette pénalité, la contribuable faisait valoir que le retard était imputable à un cas de force majeure.
Elle expliquait qu'à la suite d'une mise en examen pour blanchiment de fraude fiscale, ses avoirs bancaires détenus à Monaco et au Luxembourg avaient fait l'objet d'une saisie conservatoire par l'autorité judiciaire.
Cette mesure, selon elle, rendait impossible l'utilisation de ces fonds pour payer les impositions réclamées. Malgré une demande de mainlevée formulée avant même la mise en recouvrement, celle-ci n'était intervenue que trois ans plus tard.
Le Conseil d'État a d'abord posé un principe clair : un contribuable peut utilement faire valoir, à l'appui d'une demande en décharge de la majoration, que le retard de paiement est imputable à un cas de force majeure.
Toutefois, en l'espèce, il a jugé que les circonstances invoquées par la contribuable n'étaient pas suffisantes pour établir l'existence d'un tel cas.
En se bornant à faire valoir la saisie de ses avoirs et le délai d'obtention de la mainlevée, la requérante n'a pas démontré que le retard était la conséquence d'un événement imprévisible, irrésistible et extérieur.
L'article 1730 du CGI institue une majoration de 10 % applicable à tout retard dans le paiement des sommes dues au titre des principaux impôts (impôt sur le revenu, contributions sociales, taxes locales, impôt sur la fortune immobilière).
Cette majoration s'applique lorsque les sommes ne sont pas acquittées dans les 45 jours suivant la date de mise en recouvrement.
Il s'agit d'une pénalité à caractère objectif, dont l'application est en principe automatique dès lors que le retard est constaté. Elle a pour finalité d'inciter les contribuables au paiement ponctuel de leurs impôts et de compenser le préjudice subi par le Trésor public.
La jurisprudence admet traditionnellement très peu de causes d'exonération pour cette majoration, qui est distincte des intérêts de retard.
La force majeure est un principe général du droit qui peut faire échec à l'application d'une règle lorsque survient un événement présentant trois caractéristiques cumulatives :
En matière fiscale, la reconnaissance d'un cas de force majeure est particulièrement rare. Le Conseil d'État avait déjà admis, dans une décision de 2016 (n° 386250), qu'un contribuable pouvait invoquer la force majeure pour justifier un retard de déclaration.
L'arrêt du 7 mai 2025 étend explicitement cette possibilité au retard de paiement.
Cependant, l'appréciation des faits demeure extrêmement stricte. Dans le cas présent, le Conseil d'État a considéré que la saisie des comptes bancaires, bien qu'ordonnée par une autorité tierce, ne constituait pas un événement imprévisible et irrésistible.
La juridiction semble considérer que le contribuable doit démontrer avoir exploré toutes les autres possibilités pour s'acquitter de sa dette (recours à d'autres actifs, emprunt, etc.) et que la saisie a créé une impossibilité absolue de payer, ce qui n'a pas été établi en l'espèce. Le simple fait d'être privé de la disponibilité de certains actifs est donc jugé insuffisant.
Cette décision a plusieurs implications importantes pour les contribuables.
En définitive, bien que la porte soit théoriquement ouverte, la jurisprudence maintient une approche très rigoureuse. La force majeure reste une exception de dernier recours, dont le succès dépend d'une démonstration factuelle particulièrement robuste et circonstanciée.
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